La Grande Casse (73)

La Grande Casse, sommet de la Vanoise et montagne qui a surplombé mon enfance. C’est en effet sous ce glacier que notre fratrie a appris à skier dès notre plus jeune âge entre Pralognan la Vanoise et Courchevel. C’est également dans le parc national de la Vanoise que nous avons effectué nos premières randonnées pédestres allant déjà titiller les « neiges éternelles ». 

Jour 1 : Pralognan la Vanoise – Refuge Felix Faure

Nous nous lançons donc sur la fenêtre météo que nous offre le ciel avec Pierric, à l’assaut de la Grande Casse. Départ matinal (mais pas trop) d’Annecy pour 2 heures de trajet. Les sacs bien bouclés et les skis finalement au pied à 10h30 au parking à Pralognan ! 


La première journée se résume en une longue remontée des pistes puis d’une vallée pour accéder au refuge du col de la Vanoise ou refuge Felix Faure qui doit nous accueillir pour la nuit. 
Mais bien entendu, quelques péripéties se joignent à notre étape du jour ! Premier constat, Pierric oublie une partie de ses chaussures à Annecy. Conséquence indolore à la montée, en revanche, la chaussure perd toute sa rigidité à la descente. Mais cela, c’est l’affaire de demain et après un petit test et un « ca va aller ! », nous décidons de nous lancer dans la remontée des pistes. 
Là encore, pas mal de souvenirs, ce sont les pistes que nous descendions avec Mickaël, Léa, Papa et Maman pendant notre enfance, jusqu’à arriver d’abord aux Fontanettes au milieu des pistes puis remonter jusqu’en haut, lieu où nous y voyions quasiment à tous les coups une paire de Chamois, Mouflons ou autres Bouquetins. 
De là, commence la partie plus sauvage puisque nous nous éloignons des pistes et remontons dans un vallon bien calme. La météo est très clémente et mon visage me rappellera le soir même que l’indice 50 est bien un indispensable de montagne, tout autant que des chaussures lors de la descente. Mais ça, c’est pour plus tard. 
Le paysage est magnifique, nous remontons le long de l’Aiguille de la Vanoise, un moignon rocheux qui s’escalade et se traverse. Mon meilleur souvenir d’escalade de rocher vertigineux, que j’ai réalisé lors d’une autre virée dans la Vanoise lorsque nous avions fait le tour des Glaciers de la Vanoise sur plusieurs jours. Mais devant nous, nous la voyons, cette fois ci c’est objectif Grande Casse.

Nous apercevons le refuge. Pierric propose de faire un petit détour nous rajoutant quelques mètres de dénivelé afin de tester un peu mieux les chaussures en condition de descente. Petite montée extra effectuée, les chaussures c’est pas génial mais ça va quand même bien. Faut dire, le morceau est sympa à skier, une bonne neige de printemps. Direction le refuge et nous voyons à ce moment 2 personnes descendre du sommet que nous envisageons d’attaquer le lendemain. Il est un peu tard mais la descente à l’air agréable. Important pour l’observation du lendemain, il fait encore bien frais (-10°C à 3000m) et partir trop tôt nous assurerait d’une neige encore complètement gelée, nous prendrons cette décision le soir, partons un peu tard (7h45) afin que la neige dégèle avec le soleil et avant de descendre. 

Arrivée au refuge, un bon coca (normalement c’est bière, mais j’avais mal à la tête) en terrasse au soleil face aux montagnes, avec Pierric nous nous racontons nos exploits en montagne (oui il faut bien ajouter un peu de romanesque à mes récits), bref nos expériences et nos histoires. Les moments en refuges sont toujours des moments où seul le soleil rythme le temps. Le temps il y en a, le silence et la grandeur de paysage également, du réseau internet beaucoup moins et c’est bien comme cela. On mangera un tajine aux abricots et lait de coco, probablement le meilleur mangé, ça c’est le jeu de l’altitude et de l’effort ! Au lit à 21h pour une nuit relativement paisible pour une nuit en dortoir de refuge !

Jour 2 : Refuge Felix Faure – Grande Casse – Pralognan

C’est le jour J, on passe les yeux par la fenêtre, il fait encore noir donc on ne sait pas ce que la météo a à nous raconter. On attaque le petit déjeuner et le jour se lèvre, quelques nuages accrochés au sommet de la Grande Casse mais pas assez pour nous faire douter, c’est encore une belle journée qui s’annonce, et cette journée ce sera la notre !

C’est parti, 1300m à gravir. La première portion ne présente aucune difficulté. Il fait froid mais on avance bien en ski. Devant nous 3 cordées. Assez rapidement nous en croisons une qui fait demi-tour craignant de devoir descendre sur la neige durcie par la nuit froide. Pour notre part, ce que nous avons vu la veille et le timing que nous avons choisi nous gardent confiants (rappelons que la face est exposée Sud/Sud-Ouest, elle va donc bien prendre le soleil à partir du milieu de la matinée). 
Nous voyons le soleil apparaitre sur les hauteurs, il nous réchauffe les pensées à l’idée de bientôt l’atteindre mais nous avons encore bien froid. Nous continuons à avancer et attaquons la partie glacière, c’est l’heure de s’encorder même si le glacier semble bien inoffensif, pas la moindre crevasse à l’horizon. 

Les dernières conversions (virages) en ski deviennent compliqués. En effet, les pentes se font plus raides et la neige toujours très dure ne facilite pas la tâche, ça glisse fort. Nous y laisserons un peu d’énergie ! 
C’est le moment de déchausser les skis, les mettre sur le sac a dos, enfiler les crampons et sortir le piolet, c’est la partie la plus délicate. La pente est raide, il faut monter droit dedans et l’altitude ainsi que le poids du sac donne la sensation que la pente est encore plus raide. Cependant, la cordée qui nous précède nous a déjà bien tracé le chemin, nos crampons se glissent dans ce qui s’apparente à des marches et nous permet de progresser à vive allure. La 2nd cordée qui nous précédée a quant à elle, viré à droite avant ce passage pour emprunter un couloir aussi joli qu’impressionnant car encore plus raide. Ce couloir donne directement accès à la Pointe Matthews, juste en dessous du sommet de la Grande Casse. 
L’altitude se fait de plus en plus ressentir et c’est notre rythme de progression qui nous le rappelle, nous avançons maintenant lentement, la partie raide est passée, nous re-chaussons les skis pour quelques mètres pour progresser plus vite et nous voyons maintenant se dessiner la cime finale qui mène au sommet. 

Nous y voici au pied, il ne reste qu’une petite centaine de mètres pour atteindre le sommet (3855m). Nous laissons les skis à cet endroit pour finir en crampons. Nous arrivons au sommet, la joie et la fierté nous envahie. Le temps de se prendre dans les bras pour se féliciter puis d’observe ce paysage incroyable. Nous avons de la chance, la vue est dégagée. D’un côté le massif du Mont Blanc et tout ce qui l’entour. De l’autre le Cervin et sa forme qui permet de la distinguer de tous les autres sommets, derrière nous le Mont Viso bien seul au dessus des nuages et enfin le massif des Ecrins avec le Dôme, la Meije et les Aiguilles D’Arves. C’est un superbe et complet panorama des Alpes. 
Il est temps de redescendre la crête, récupérer nos skis et amorcer la descente.

Clic, clac ! Les skis sont chaussés et c’est parti pour 2400m de descente ! Il y en aura pour tous les goûts, du raide, du plat, du fondu, du dur, de la poudre. Pierric part devant et je le suis de prêt (rappelez vous, il a un handicap !). Premier virage, le ski déchausse. Second et 3e virage, rebelote. Nous n’avons pas encore attaqué la partie raide que les skis de Pierric lui fond déjà la misère ! « Des chaussures en chewing-gum » me dit-il ! On sert un peu mieux les skis et il arrive finalement à avancer, c’est pas hyper fluide mais ça se passe quand même bien. Ca fait du bien de faire jouer la gravité ! En revanche, les cuissots commencent quand même à sévèrement bruler !!! 

Toute la descente du glacier se fait bien. La neige est bien mole dès là moitié du glacier et ça sera le tarif jusqu’au parking. Une vraie joie, nous retrouvons toutes nos aptitudes, l’oxygène est de suite plus abondant, nos avons le sourire jusqu’au oreilles. Quelle journée, un sommet qui se refusait à Pierric (3 tentatives par différentes approches), mon sommet d’enfance, un paysage à couper le souffle et un météo plus que clémente. 

On retraverse les pistes de ski, l’occasion de faire quelques virage et finir de se faire mal aux cuisses puis la voiture est là ! Il ne reste plus que le plaisir de se déchausser et de se promettre de nouvelles et prochaines aventures en montagne avec mon compagnon de cordée !